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Clive Barker’s Jericho │ ★ 7

Jericho s’est fait flinguer par la presse spécialisée, à juste titre. C’est un FPS médiocre, les sensations de shoot sont molles, son level design enchaîne arènes et longs couloirs vides en ligne droite, et son scénario de série B dans un univers d’horreur gore putassier ne rattrape rien.

Pourtant, c’est un de mes gros coups de coeur de l’année dernière, que je me suis enfilé en quelques jours avec un bel entrain pour y revenir insatiablement quelques mois après. WTF, me direz-vous ?

Si le nom n’est pas familier, Clive Barker est un romancier britannique particulièrement connu pour ses contributions au genre Splatterpunk (horreur sanglante, déjantée et nihiliste). En France, il est principalement connu pour sa carrière cinématographique avec des films comme Hellraiser (Le Pacte) ou Candyman. Dans les années 90 et 2000, au même titre qu’un Tom Clancy, son nom était suffisamment connu pour qu’on l’attache à quelques jeux, notamment deux titres sur Amiga mais surtout au FPS Clive Barker’s Undying.

Une fois n’est pas coutume, je vais commencer par lister tout ce que vous trouverez probablement détestable, et si vous ne vous sentez vraiment pas la force de passer outre, ce n’est pas la peine d’aller au-delà :

  • Les deux premières heures sont les plus mauvaises du jeu.
  • Vos coéquipiers IA passent leur temps à crever.
  • Les (rares) QTE sont aussi relou que peuvent l’être celles d’un mauvais portage PC.
  • Le level design est merdique la moitié du temps.
  • Certaines mécaniques sont totalement sous-exploitées.
  • Pas moyen de sauter (je sais que ça peut en révolter certains)
  • La fin est complètement torchée (tout est bouclé en moins de 3 secondes).

Mais alors, pourquoi c’est aussi bien ?

Pinhead, personnage emblématique des films “Hellraiser”.

Changer de Corps

Le système d’escouade et de changement de corps, c’est l’idée de l’année. En deux mots, vous jouez un esprit qui a la capacité de passer d’un corps à un autre. Vous pourrez vous glisser à tout moment dans chacun des six membres de l’unité d’intervention, héritant d’un lot de caractéristiques uniques (résistance, armement) et de plusieurs pouvoirs très spécifiques.

Cette pirouette de gameplay est bien introduite, scénaristiquement, et vous vous ferez même parfois engueuler par vos hommes quand vous leur entrez inopinément dans la caboche (avec aussi quelques répliques dignes d’un film d’action des années 80, comme celle du Commando à la Snipeuse lesbienne : “Hey Black, tu sais enfin ce que ça fait d’avoir un mec en toi !”)

L’intérêt de ce système est qu’il permet d’aligner un nombre impressionnant de mécaniques de jeu, armes, sorts et gadgets, sans trop complexifier ou alourdir le gameplay puisque vous n’avez pas accès à tout en même temps. Cela implique également des choix tactiques intéressants quant au choix de la personne à incarner (faut-il un personnage résistant, vais-je aller placer ce mec en première ligne) et à fil de vos expérimentations, vous découvrirez des combinaisons ou des astuces diverses liées aux pouvoirs (et hop, un slow-mo pour aller rez toute mon équipe)

Vos personnages meurent souvent, mais n’importe quel membre de l’escouade peut les relever et seule l’annihilation du groupe entier se solde par un game over. Ca peut sembler très permissif mais croyez moi, ça arrive bien plus vite qu’on pourrait le penser car l’action est frénétique et le jeu va vous noyer sous un déluge d’ennemis particulièrements agressifs et suffisamment léthaux pour laisser vos opérateurs sur le carreau en un instant.

De même, on a beau critiquer le level design, il contribue efficacement à faire utiliser chaque membre de l’équipe en profondeur (en séparant parfois le groupe + une ou deux excursions solo ou simplement en vous projetant dans un corps aléatoirement quand le votre meurt). Au final, j’aime beaucoup ces arènes et ces larges couloirs, avec de longs combats contre des vagues d’ennemis qui donnent lieu à des batailles assez épiques.

Un Arsenal démesuré

Parlons aussi des pouvoirs et des armes qui contribuent amplement au fun et à la diversité du titre.

Pour les pouvoirs, on a notamment une entrave qui ralenti les ennemis, un slow-motion très puissant, un sort de résurrection à distance (pour vos coéquipiers), une éjection pyrotechnique, une télékinésie de balle de snipe en vue subjective (vous contrôlez la balle et pouvez aligner jusqu’à trois cibles avec un peu de pratique, c’est encore plus abusé que Wanted), une contrôle mental, une zone de feu, un feu-follet à tête chercheuse et j’en oublie sûrement.

Du côté des armes, c’est plus classiques, avec toutes sortes de modèles de mitrailleuses, une grosse gatling, des colts, mais surtout un merveilleux Katana qui ne manquera pas de ponctuer vos plus beaux frags par un slow-mo automatique vous permettant de voir la victime décoller du sol (difficile à décrire, ça doit se vivre ^^)

Pour des combats dantesques

Bilan : j’ai utilisé tous les personnages, le jeu ménageant à chacun sa petite heure de gloire avec un passage qui lui est dédié ou durant lequel ses pouvoirs font la différence. Certes, je n’ai que très peu utilisé le medium et j’avais une grosse préférence pour Church et sa combo Uzi/Kata/Magie de sang, mais dans l’ensemble, c’était assez équilibré.

Ce système brille particulièrement contre les boss qui demandent tous une tactique spécifique, rarement évidente à trouver. Ils mettront à l’épreuve contre compréhension des personnages en forçant l’utilisation de certaines skills comme la prise de contrôle d’ennemis. C’est vraiment durant durant ces batailles ouvertes à grandes échelles que le jeu prend toute son ampleur.

Un petit bémol, quand même : certaines capacités sont complètement sous-exploitées par le level design et une fois sorti du tuto qui vous les fait découvrir, vous n’en entendrez plus parler. Ca sent la sortie précipitée. Je citerai particulièrement le sort d’immunité au feu.

L’univers et la narration

J’ai parlé de scénario de série B. Je le maintiens, mais on s’en fout. J’ai toujours préféré une mauvaise histoire bien racontée à une bonne histoire mal racontée. Celle de Jericho est bien amenée, à travers toutes sortes de dialogues entre les 7 membres de l’escouade, lors de cinématiques mettant en scènes créatures, NPC et autres phénomènes ectoplasmiques (vous passez le début du jeu à suivre un fantôme de mioche qui chuchote).

Sans toutefois la rendre très interactive (ça reste un FPS), le jeu développe une vraie dimension sociale par les interactions fréquentes de ses personnages qui discutent et s’interpellent, et qu’on apprend peu à peu à connaitre. On découvre leurs passés tourmentés, leurs peurs, leurs relations parfois équivoques. Certains ne peuvent pas s’encadrer, d’autres ont couché ensemble
.
On ne s’y attarde pas énormément parce qu’on est trop occupés à faucher les armées démoniaques pour raconter nos vies mais les dialogues dégagent une indéniable authenticité, car on sent que les biographies des personnages ont été écrites dans le détail, qu’ils ont un passé commun, même quand ce n’est pas explicité.

Le casting échappe adroitement aux stéréotypes et chaque personnage se révèle finalement bien construit, avec assez d’épaisseur pour maintenir mon attention et me donner envie de recommencer en Hard pour débloquer les fiches de Background.

L’effet Clive Barker

Je ne suis clairement pas fan des univers de Clive Barker mais le fait d’avoir un écrivain aux commandes est un bel atout. Comme avec les personnages, même si ce n’est qu’évoqué, on sent qu’il y a un background touffu derrière les évènements du jeu, et que l’univers est bien plus riche et ramifié que le peu qu’on en devine.

Vous entendrez parler de plusieurs factions antagonistes, d’évènements passés, et même si c’est parfois un peu difficile à suivre avec les noms propres Allemands, c’est très intéressant de rassembler les pièces du puzzle.

A ce titre, je ferai un audacieux parallèle avec le premier Metal Gear Solid dont le scénario était particulièrement bidon mais qui mettait en place une grosse mythologie très touffue qui le rendait finalement très attrayant.

7

7/10
Bonus: Church & Black

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