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The Walking Dead: The Final Season │ ★ 8

Ah mais quelle grande série que ce Walking Dead ! Et je ne parle pas bien sûr de la tiède adaptation d’AMC, mais des 3 saisons et demi de Telltale, dont Skybound vient de signer la conclusion.

Je ne suis pas spécialement fan de la licence : je n’ai pas lu les livres, et si j’ai quand même vu quelques saisons de la série, je lui reproche de souvent manquer de souffle et d’aligner des personnages qu’on a envie de voir mourir, si possible dans de sanglants tourments. Pour autant, je suis généralement friand de zombies.

Entendons-nous bien : le coeur des fictions de zombies, c’est qu’on se fout des zombies. Ce qui compte, c’est ce que deviennent les humains dans un monde rugueux et hostile, quand toutes les institutions et structures qui encadraient nos vies ont disparu. Les zombies sont alors une menace de second plan qui met en exergue les tensions entre les survivants, jusqu’à transformer les parangons de vertus en parfaits connards.

Telltale l’a parfaitement compris et The Walking Dead n’est pas là pour conter un récit, pas plus qu’il n’est une histoire de monstres. Chaque saison introduit des personnages, des enjeux, et serre la vis en mettant juste assez de pression pour que craque le vernis de la bienveillance et du civisme, et qu’on voit ce qu’il y a réellement au cœur de chacun.

Durant 4 saisons, nous avons suivi Clémentine, un personnage si attachant que… tout le monde aime Clémentine, et si ce n’est pas votre cas, vous êtes sûrement un monstre. Saluons aussi la performance de Melissa Hutchison, sa doubleuse officielle, qui donne vie au personnage depuis son enfance jusqu’à l’âge adulte.

  • Dans la saison 1, Clémentine est toute petite, et c’est dans le rôle de Lee, son gardien, qu’on apprend à la connaître.
  • Saison 2, Clémentine est encore enfant et vulnérable. A défaut de pouvoir survivre par elle-même dans un futur post-apocalyptique particulièrement hostile, elle est sans cesse obligée de naviguer au gré d’alliances éphémères avec des adultes tous plus névrosés, psychotiques, dangereux et instables les uns que les autres. Et c’est ce qui fait tout le sel de cette saison, qui reste ma préférée.
  • Saison 3, changement de personnage : on découvre par ses yeux une Clémentine ado férocement indépendante et pragmatique, et on ne peut que deviner en filigrane les épreuves par lesquelles elle a dû passer.
  • Saison 4, Clémentine est une jeune adulte qui en a vu d’autres, mais a pourtant su garder du cœur de l’empathie, des qualités essentielles qui semblent souvent faire défaut dans ce monde devenu fou.

Ainsi, quelles que soient ses qualités intrinsèques, cette saison finale partait avec un gros avantage : celui de pouvoir se reposer sur l’épaisseur et le charisme d’une héroïne qui a déjà jeux derrière elle, et à qui les joueurs ont eu largement le temps de s’attacher.

Pour le reste, on découvre une nouvelle galerie de personnages ambivalents et souvent plus complexes qu’ils n’y paraissent. Ce n’est pas le meilleur cast de la série, loin de là, et j’aurais voulu passer plus de temps avec leurs antagonistes pour mieux comprendre leurs motivations, leur guerre, et ne pas juste les percevoir comme de malveillants kidnappeurs.

On touche au premier défaut de cette saison : il lui manque au moins un épisode, voire deux, et ça se précipite un peu vers la fin, si bien que certains personnages pourtant prometteurs manquent cruellement de profondeur. C’est le cas d’Abel, Minerva et James, qui ont beaucoup trop peu de temps à l’écran pour dévoiler leur potentiel.

Et puis il y a les personnages qu’on aurait voulu voir un peu moins. C’est de toi qu’on parle AJ, et arrête de faire la gueule. Avec AJ, Skybound essaye de nous refaire le coup de la saison 1, mais en inversant les rôles pour mettre Clémentine dans le rôle du gardien. La boucle est bouclée, tout ça. Je ne dirais pas que c’est un échec, mais c’est loin d’être un succès.

AJ est au cœur de cette saison, car il est à la fois le principal moteur d’action de Clémentine, mais aussi au centre d’un nouveau système narratif où l’on nous invite à l’influencer et le modeler à notre guise, au gré des conseils, compliments ou réprimandes qu’il prend EXTRÊMEMENT à cœur et souvent beaucoup trop au pied de la lettre. Sur le papier, c’est très stimulant, mais l’exécution se prend les pieds dans l’écriture du personnage.

AJ est tout ce que la petite Clem de la saison 1 n’était pas : violent, borné, instable, boulet, imprévisible et impulsif. Alors oui, ça ne parait pas déconnant pour un gamin de son âge d’être relou et de demander beaucoup trop de maintenance, surtout quand on sait qu’il est né en milieu zombie et n’a connu que la survie et la violence durant ses plus jeunes années.
Je ne dis pas que le personnage n’est pas crédible, mais si j’ai soigneusement évité de faire des enfants, ce n’est pas pour m’en taper une simulation réaliste. Honnêtement, la relation était quand même intéressante à explorer, et essayer d’anticiper comment ma dernière recommandation à AJ allait se transformer en catastrophe, a fini par devenir un loisir à part entière.

Le problème est que Clem serait prête à mourir pour AJ, et moi j’attendais avec impatience qu’il se fasse croquer. Je ne me suis jamais senti émotionnellement impliqué dans cette relation et n’ai pas partagé l’amour inconditionnel que Clémentine semble lui vouer.
J’étais suffisamment immergé dans le personnage de Clem pour prendre des décisions en faveur de la sécurité d’AJ et ne pas essayer de le faire crever, mais il est devenu difficile de rester vraiment immergé quand il y avait un tel décalage dans nos perceptions du gamin : fardeau à mes yeux et prunelle des siens.

AJ n’est pas le seul gamin turbulent de cet épisode, puisque presque tout le cast est mineur. Les enfants ont toujours été un thème majeur de la série, et très représentés parmi les personnages. Ils permettent de créer un contraste intéressant entre leur innocence et le niveau de délabrement et de corruption du monde qui les entoure. Le ton de cet épisode est d’ailleurs toujours aussi sombre qu’à l’accoutumée, avec ses scènes de tension, d’action, mais aussi des moments plus lents et tendres.

Tant qu’on parle du rythme, certains passages sont quand même un peu longuet, mais je pense que mon déficit d’immersion y était pour quelque chose. À cause d’AJ, la sauce ne prend pas aussi bien, mais les scènes de rêves avec Lee ont brillamment broyé mon petit cœur. D’autres passages oniriques ajoutent une note de surréalisme qui sied bien à l’ambiance du titre, de même que les quelques flashback qui nourrissent les enjeux dramatiques et étoffent les personnages.

Dans l’ensemble, et malgré mes réserves, cette saison finale est une belle conclusion à une grande série, et c’est presque un miracle quand on connait sa gestation mouvementée.

8

8/10

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