En 2021, j’ai découvert l’existence de Planet of Lana à l’occasion d’une bande-annonce pendant les Game Awards. On y découvrait une mystérieuse planète, une direction artistique phénoménale et une course poursuite épique mêlant 2D et 3D avec des effets d’échelles incroyablement prometteurs. Aucun doute : Planet of Lana allait nous en foutre plein la vue.
Après avoir totalement disparu de mes radars, le jeu surgit de nulle part, deux ans plus tard. Est-ce qu’il tient ses promesses ? Paresseusement. La course poursuite endiablée montrée dans le trailer est la seule scène d’action du jeu, et c’est une cutscene qui ne représente en rien le gameplay. La direction artistique, en revanche, est aussi classieuse que prévu.
N’est pas Playdead qui veut
Selon sa page Steam, Planet of Lana est un cinematic plateformer sur fond de saga épique de science-fiction qui s’étend sur des siècles et des galaxies.
Quand on parle de “Cinematic plateformer”, on pense aux jeux Playdead : Limbo et Inside. Laissez-moi vous dire qu’on est loin du compte. Si on pense au plus récent et décevant Somerville, on commence à s’approcher de la réalité, sauf que Somerville avait l’avantage d’être très bien mis en scène.
Planet of Lana n’est ni cinématique ni un plateformer : peu de passages sont réellement mis en scène et on est loin de la virtuosité narrative d’Inside. Si le dernier tiers du jeu s’en tire avec les honneurs, l’essentiel de l’aventure n’est que très vaguement cinématographique. Est-ce au moins un plateformer ? Encore moins.
Les séquences de plateforme sont aussi pauvres que rares. Lana manque de souplesse et se déplace assez lourdement. La plateforme se limite à sauter, s’accrocher à des rebords et se balancer à des lianes. Ces actions ne sont généralement là que pour vous emmener d’un puzzle à un autre et ne représentent aucun challenge. C’est plus de l’habillage qu’autre chose pour ajouter un peu de variété aux déplacements, parce que vous allez pas mal crapahuter.
Oh, et vous pouvez vous asseoir sur la “saga épique de science-fiction qui s’étend sur des siècles et des galaxies”. Le jeu se déroule sur une poignée de jours, tout au plus, et raconte la quête de Lana à la recherche de sa famille disparue.
Mais si Planet of Lana n’est ni cinematique ni plateformer, c’est quoi ? C’est un très beau jeu de puzzle. Vous évoluez dans des paysages somptueux où le mélange de 2D et de 3D ajoute énormément de profondeur. Les couleurs sont élégantes, les décors toujours parfaitement lisibles, et je savais toujours exactement où aller.
Malheureusement, manette en main, l’essentiel de l’aventure se limite à enchainer mollement des puzzles pas très inspirés, avec un peu de liant narratif d’un chapitre à l’autre.
Je peux pardonner un trailer mensonger, ou même une page Steam qui raconte n’importe quoi, mais si le jeu est chiant, c’est une autre histoire. Ici, on est dans une zone grise à la lisière du fun. Je ne me suis jamais ennuyé au point de poser le contrôleur, mais il y a eu un moment, vers la fin, où j’ai sérieusement envisagé de terminer sur Youtube pour m’épargner encore une heure de puzzles laborieux.
Le problème de ces puzzles n’est pas qu’ils sont mal conçus, mais c’est du déjà vu, déjà joué. Le twist consiste à avoir à un petit animal pour vous aider. Vous pouvez lui donner des ordres ou le contrôler à distance et… c’est à peu près tout. Le puzzle le plus difficile m’a demandé quelques minutes de réflexion et je n’ai jamais eu besoin d’une soluce, ce qui est un niveau de difficulté qui me convient parfaitement.
Une fois qu’on sait ce qu’on a à faire, l’exécution est lente et un vaguement pénible. Ce n’est pas non plus rédhibitoire, mais on n’en est pas loin. Et même chose pour l’inventivité : il y a parfois des petites fulgurances, des énigmes visuellement chiadées, ou avec une idée très sympa, mais il y en a une pour 5 poussages de caisses et 10 interrupteurs sous des formes diverses.
Je parlais de liant narratif entre les puzzles, et là aussi, le jeu souffle le chaud et le froid. Certains moments sont bucoliques, mignons ou intrigant, et tout le dernier tiers en met plein la vue. Mais en dehors de ça, c’est le minimum syndical : on court d’un paysage à l’autre, on prend le bateau jusqu’au biome suivant, et il y a quelques petites scènettes oniriques pour essayer de créer de l’empathie avec le personnage qui a perdu son frère.
Seulement son frangin, je n’en avais strictement rien à secouer. La scène d’intro essaye d’établir leur relation complice et leur amour fraternel, mais la seule chose qu’on les voit faire, c’est crier leurs noms comme des putain de Pokemon en courant dans les buissons. Les doublages sont irritants au possible et j’avais hâte qu’il se fasse kidnapper.
Le jeu est doublé dans une langue imaginaire que Lana utilisera par la suite pour donner des instructions à son chat. C’est une idée sympa qui marche correctement pendant les énigmes, mais devient rapidement agaçante durant les cutscenes. Après le douzième “Iiiiilo” crié dans le vent, j’ai eu très envie de couper le son.
Planet of Lana n’est pas un mauvais jeu, mais pour l’apprécier plus que moi, vous avez intérêt à savoir dans quoi vous vous lancez. Personnellement, j’ai passé 3 heures à attendre LE moment du trailer qui s’est avéré n’être qu’un pétard mouillé.
Abordé avec plus de neutralité, c’est un petit jeu d’aventure à puzzles tout juste honnête, sauvé par une chouette direction artistique et une réalisation de toute beauté. On avance pour admirer le prochain paysage plus que pour découvrir les puzzles qui sont juste assez stimulants pour ne pas débrancher son cerveau, mais pas assez inventifs pour susciter plus que le minimum d’excitation vitale.