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Like a Dragon: Ishin! │ ★ 8

Difficile de décrire à quel point j’étais heureux et excité lorsque RGG a annoncé qu’ils sortaient enfin Ishin! en occident. Amoureux de la série des Yakuza depuis maintenant 3 ans, j’en ai poncé chaque opus et chaque spin-off avec une passion indéfectible, pour un total de 12 jeux.

Entre deux épisodes de la série principale, le studio a sorti deux titres assez particuliers : Kenzan! en 2008, et Ishin! en 2014. Situés respectivement dans le Japon de 1605 et 1866, il s’agit de reconstitutions historiques très libres et romancées d’évènements historiques japonais, où les personnages de l’époque sont interprétés par les héros des jeux Yakuza : Kiryu, Majima, Date, et beaucoup BEAUCOUP d’autres.

Le résultat est forcément un peu étrange puisqu’il s’agit absolument d’un jeu Yakuza, avec tout ce que ça implique (brawler, cutscenes à ne plus savoir qu’en faire, mini-jeux, ruptures de tons entre beaucoup trop sérieux et complètement débile, grosse couche de RPG) avec des personnages connus qui font du cosplay déguisés en samuraïs.

Il aura fallu et presque 10 ans pour que Sega se sorte enfin les doigts et accepte de localiser un jeu qui n’était jusqu’alors qu’en japonais non sous-titré, et que ses fans en occident réclamaient à cor et à cri. On devine que le succès de Ghost of Tsushima y est pour beaucoup.

Pourquoi faire un remake d’Ishin plutôt que Kenzan ? Certains soupçonnent que c’est lié à certains thèmes qui seraient mal reçus par un public américain, comme le fait que Haruka, 12 ans, fait le ménage dans une maison close. Beaucoup considèrent Ishin comme largement supérieur à Kenzan, donc je peux comprendre que Sega commence par son meilleur titre pour allumer le feu, avant de décider s’il est rentable de localiser Kenzan.

Pourquoi faire un remake d’Ishin plutôt qu’un remaster ? La question serait plutôt : s’agit-il vraiment d’un remake ? Le jeu est vendu comme un remake, et techniquement, il s’agit d’un portage du jeu dans un tout nouveau moteur, puisque RGG utilise l’Unreal Engine pour la première fois. On peut d’ailleurs se demander s’il s’agit d’un tournant à l’échelle du studio ou juste d’une expérience de production.

Malgré le changement de moteur et la refonte des cutscenes, Ishin est parfaitement fidèle à l’original, et c’est exactement ce que j’en attendais.

Les changements concernent surtout le choix des ‘acteurs’, et pour satisfaire les fans de la série, le studio a remplacé quelques vieilles têtes de l’époque (de Yakuza 1 à 4) par des personnages beaucoup plus cool et populaires tels que Kuze, Awano, Joon-gi Han ou Adachi. On retrouve davantage de personnage de Yakuza 0 et 7, puisqu’il s’agit des épisodes les plus populaires de la série qui sont sortis après Ishin. Dans l’ensemble, je suis absolument en phase avec ces changements.

Visuellement, en revanche, j’espérais un peu plus de travaux pour un jeu qui se qualifie de remake et se trouve vendu à 60 balles 10 ans après sa sortie initiale. Les visages des personnages importants ont tous reçu un gros lifting, mais les NPC sont tout droit sortis de la PS3, la plupart des textures et des décors sont aussi flous et grossiers que dans l’original, et sorti d’un rendu bien plus moderne des lumières, il faut parfois cligner des yeux pour voir la différence entre les deux versions du jeu.

Même chose pour le gameplay qui accuse méchamment son âge et n’a reçu aucune attention dans cette réédition. Les combats sont raides, les attaques manquent de précision, le ciblage est complètement pété et la caméra fait n’importe quoi, ce qui peut rendre les boss très frustrant quand on se fait stun-lock sans réussir à garder son perso orienté dans le bon sens pour parer.

Fidèle à la tradition des Yakuza pré-Dragon engine, les combats de rue sont corrects, mais les boss, quoique magistralement mis en scène, sont souvent pénibles, alors qu’ils devraient être d’excitants moments de challenge où on met votre compréhension des systèmes à l’épreuve. Au lieu de ça, je me cantonnais souvent à mon style le plus efficace, en spammant n’importe quoi qui fonctionne, et en espérant avoir suffisamment de bouffe pour atteindre le prochain checkpoint.

Encore une fois, rien de tout cela ne m’aurait gêné dans le cadre d’un remaster au tarif plus doux, mais pour un remake vendu au prix fort, c’est un peu abusé de se retrouver avec une copie aussi conforme de l’originale et de payer plein pot la localisation.

Comme tout Yakuza qui se respecte, Ishin est un jeu un peu boursoufflé et bourré de défauts, mais qui a tant de cœur et une telle générosité qu’on ne peut jamais lui en vouloir bien longtemps. Et ne ce sont pas les défauts qui manquent dans cet épisode :

  • L’histoire démarre assez vite, mais il y a comme un gros ventre mou dès l’arrivée à Kyoto et ce n’est qu’après une dizaine de jeu que l’intrigue décolle réellement.
  • Le système de combat permet d’alterner entre 4 styles, mais le Katana est tellement pété que je n’utilisais les autres que par souci de variété. A investissement égal dans l’arbre de talents, j’ai toujours fait 4 fois plus de dégâts au katana qu’avec n’importe quoi d’autre.
  • Les décors sont littéralement jonchés de breloques qui brillent et de boites à ouvrir, mais dans 80% des cas, vous ramasserez ces foutus tickets de loteries. Munis de vos tickets, vous pouvez aller tourner une roue et perdre 20 fois de suite, en entendant à chaque fois le gémissement déçu de l’hôtesse qui n’en croit pas ses yeux. J’ai vite cessé de ramasser quoique ce soit.

  • Le système de craft et d’améliorations d’armes est aussi facultatif que dans les autres épisodes, mais surtout toujours aussi bancal. Les arbres d’améliorations vous montreront des dizaines d’items que vous ne pourrez jamais crafter, à moins de farmer jusqu’à ce que mort s’ensuive.
  • L’histoire est truffée de noms propres incompréhensibles pour désigner les factions et le Bafuku des Shinsengumi aux ordres du Tokugawa shogunate et leurs interactions avec le Choshu Domain Army ou l’allience Satcho. Mais le pire, c’est que chacun des très nombreux personnages peut être désigné par son nom ou son prénom, et multipliez ça part deux quand tout le monde dévoile son identité secrète. Ça m’a cause de sacrées migraines pendant plus de la moitié de l’aventure, le temps de retenir les noms essentiels, et j’ai passé beaucoup de temps dans le glossaire intégré.

Autre sujet qui fâche : les “sub-stories”, ou missions optionnelles, qui ont fait le succès de la série avec leurs intrigues loufoques et leurs morales parfois touchantes ou naïves.

Ici, on a bien quelques sub-stories à l’ancienne avec une intrigue linéaire et un peu de cassage de bouches au milieu. Cela dit, pour une histoire annexe prenante et bien écrite, on a 10 pseudo quêtes de remplissage consistant à parler 20 fois au même NPC pour lui donner un poireau, jusqu’à débloquer un pauvre dialogue de conclusion. Sérieusement, il y a tellement de NPC qui me quémandent des légumes que je ne sors jamais sans une une trentaine de daikons.

J’ai mis longtemps à comprendre quoi faire face à cette profusion de contenu paresseux et j’ai fini par ignorer certains de ces personnages clodos. Il peut s’agit de nourriture, d’armes ou de n’importe quel objet, vraiment. Certaines ‘relations’ se développent quand vous visitez un magasin ou un resto à de multiples reprises, mais à moins de passer 200h sur le jeu, vous n’en verrez qu’une fraction, et ça doit être un véritable enfer pour complétionniste.

Les quêtes annexes sont bien plus intrusives qu’à l’accoutumée, car toujours placées sur le chemin critique. A tout moment, quand la trame principale vous demande d’aller quelque part en ville, vous pouvez être certain que vous déclencherez une paire de quêtes annexes judicieusement placées en chemin.
Cela donne un rythme bizarre et haché où Kiryu est en train de courir pour sauver la femme qu’il aime d’un danger mortel, mais s’arrête pour aider une vieille dame à traverser la route, offrir des poireaux à un restaurateur en panne d’inspiration, ou une petite session de karaoké.

Vous êtes toujours là ? Parce que maintenant qu’on a évacué tout ça, reste à expliquer pourquoi je mets 8 à un jeu aussi moisi du fion.

  • L’histoire met longtemps à trouver son rythme, mais quand elle le trouve, OH BOY! L’intrigue est haletante et ne cesse de prendre des directions inattendues, avec des rebondissements à n’en plus finir et plein de belles surprises. Impossible d’en dire plus sans spoiler, mais malgré mes réserves initiales, le jeu m’a scotché du milieu à la fin.

    Après un début plutôt timide, RGG fait péter le budget et enchaîne les cutscenes épiques interminables, avec des intros de boss aux chorégraphies fantastiques, des trahisons, des vengeances et de belles amitiés viriles.

  • Les personnages ont toujours été la grande force de la série, et vous en aurez pour votre argent. On se retrouve avec un best of de tous les meilleurs protagonistes de la série, y compris ceux, comme Mine, qui avait connu une fin tragique. Non seulement Mine fait son come-back, mais on lui a donné un rôle majeur et plein de scènes avec Kiryu. J’ai enfin pu vivre la bromance avec Mine dont j’avais toujours rêvé, et rien que pour ça, Ishin! gardera une place dans mon cœur.
  • A côté de ça, vous passerez beaucoup de temps avec Majima à qui on a donné un arc assez touchant, et toute une galerie de seconds rôles allant d’Akiyama à Ryuji Goda en passant par Date, Nishiki, Haruka, Yuki et même ce bon vieux Watase. Tous ont droit à leurs moments, et c’est du pain béni pour fan de voir tout ce beau monde interagir dans un nouvel environnement, sous de nouvelles identités.

Vous aimez les mini-jeux ? Alors, accrochez-vous : cartes à collectionner, donjons, baseball au canon, courses de poulets, pêche à la ligne, jeux d’argent, l’inévitable Mahjong, danse traditionnelle (où Kiryu vous montrera “l’esprit du Japon”), coupe de bois, stand de nouilles (très différent de Y5), karaoke (Baka Mitai et son solo à la flûte).

Et ce n’est pas tout ! Assez tôt dans le jeu, vous vous retrouvez en possession d’une ferme qui ouvre un nouvel éventail d’activités : housing, expansion de votre potager, cuisine (avec une flopée de mini-jeux associés), commerce, etc. Vous pourrez même recueillir des animaux de compagnie pour peupler votre lopin de terre, développer avec eux des relations et obtenir des récompenses.

Et enfin, vous trouverez aussi plusieurs dojos pour affiner vos compétences martiales avec plusieurs Sensei, dont l’indéboulonnable maître Komaki qui se fera un plaisir de vous enseigner son Tiger drop si vous lui rendez visite assez souvent. Et… c’est là tout le problème. Il y a tant de choses à faire en permanence qu’il est facile de complètement en oublier certains.

Yakuza Ishin! n’est pas un épisode majeur et certainement pas l’épisode par lequel aborder la série. C’est un opus pour amoureux de Yakuza, bourré de fan service, de personnages mythiques et de références aux autres épisodes.
Et à ce titre, c’est une vraie réussite qui compense ses nombreux défauts par une histoire stimulante, une orgie de personnages incroyables, et un contenu pléthorique qui vous tiendra au minimum une quarantaine d’heures.

RGG studio confirme qu’ils n’ont encore jamais fait de mauvais jeux, et je n’ai plus qu’à attendre impatiemment leur prochain “Like a Dragon Gaiden” qui devrait encore une fois casser la baraque.

8

8/10

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